LE BANQUET DU FAISAN

LE BANQUET DU FAISAN

Exposition personnelle, Lieux Communs, Champion, 2017

La louve et les fillettes, céramique et taxidermie, aide à la production Artelinea 2017

Femmes à poils, dessin, 2015

2017- FESTIN
taxidermie et céramique, 100 x 100 cm
production Artelinea

Festin questionne les rapports complexes qu’entretiennent chair et pouvoir. La Louve inaugure le Festin. Ce moment suspendu d’opulence buccale pendant lequel les besoins laissent place aux désirs de chairs les plus savoureuses. Nos bouches salivent. Nous savons que la Louve n’est que le début, on fantasme déjà les chairs à venir ; renardes peut-être, faisanes sûrement, proies plus exotiques ? Quel goût peut bien avoir une girafe ? Mais déjà, la Louve déçoit nos palais impatients. Elle manque cruellement de viande à mastiquer, d’os à gratter et de mœlle à sucer. Il n’y a plus rien. Plate, étendue, soumise, la Louve, pauvre étoile, n’est qu’un tapis de poils et de mamelles creuses. La Lupa a rendu les armes bien avant que la table soit dressée. Epuisée, vidée de son lait et de son sang par des bouches cramoisies qui n’ont pas laissé de traces. La louve est une figure symbolique ancienne. Elle est la Lupa Romana, la louve nourricière qui recueille les jumeaux Rémus et Romulus, fondateurs à venir de Rome, fils d’une vestale qui ne respectât pas son vœu de chasteté et d’un dieu. Une autre version de ce mythe fondateur parle non d’une louve mais de Lupa, une prostituée qui avec son mari Faustulus, gardien de troupeaux, recueillirent et élevèrent les jumeaux nouveaux-nés abandonnés. En latin donc, Lupa est à la fois la louve nourricière et la prostituée. Elle est la femme qui fait le commerce de sa chair, celle qui exerce dans les Lupanars. Mais la Louve c’est aussi la bête, la force sauvage. On trouve le terme de Loba, qui se traduit également Louve. La Loba est une femme qui inquiète, isolée, velue, solitaire, elle croasse et caquette. Elle ramasse les os oubliés, les rassemble et leur redonne vie. Mais ici, Festin n’a rien de sauvage. Réduite à l’état de carpette décorative, de descente de lit ou tout au plus d’essuie-pieds, la bête nourricière, la femme qui inquiète, la Lupa, gît tel un linceul échiné, condamnée par la gloutonnerie des bouches féroces, sans pitié, à une mort silencieuse et grotesque.

2017
céramique, dim. variables.
production Artelinea

Les Fillettes sont des réminiscences d’êtres fabuleux de civilisations anciennes, postures en demi-lotus (rappelant celle du Buddha Gotama en Virasana), posées sur leurs piédestaux, semblent scruter la dépouille. Cérémonie silencieuse et hiératique, corps de terre cuite aux figures brutes et pétrifiées. Corps énigmatiques pourtant, atteints d’une sorte d’hypertrichose congénitale. Velues donc mais a priori inoffensives, Les Fillettes nous apparaissent dès lors, malgré leur apparence physique proche de la notre, comme n’appartenant pas à notre groupe social. Elles nous tendent le miroir qui reflète une image dans laquelle nous n’avons pas envie de nous reconnaître. Étrangement familières, elles deviennent étrangères, voire persécutrices, car elles nous dévoilent notre propre étrangeté.